"Chargement..."

L'exil

Henry de Montherlant

  • Mise en scène, scénographie, dramaturgie, décor : Alain Grand
  • Costumes: Josiane Baeriswyl, Grand Théâtre de Genève
  • Création lumières: Mario Torchio
  • Régie générale : Jacques Modoux, Benjamin Pillet, Frédéric Gobet
  • Maquillage : Rachel Roggo
  • Habilleuse : Julia Barras
  • Accessoires : Dominique Auderset, Victor Oberson
  • Photographies : Aurélien Espinasse
  • Graphisme publicitaire : Aurélien Espinasse, Diane Ayer
  • Musique : René Aubry
  • Captation : Mathieu Brulhart, Alain Ruffieux
  • Sources historiques : Serge Rossier
  • Sources presse écrite : François Gross
  • Servants de scène : Jérémie Pasquier, Julia Barras
  • Mobilier : Pierre-Alain Dupasquier
  • Personnel d'accueil : La Troupe
  • Coproduction : Collège du Sud, CO de la Gruyère, Théâtre du Latécoère
Jeu :
  • Marie Débois
  • Marion Savoy
  • Nona Fragnière
  • Marie Fontannaz
  • Rebecca Zangerl
  • Yasmine Ishak
  • Valentin Blein
  • Félicien Von Oetinger
  • Julien Andrey
  • Fabien Gerber
  • Geoffroy Menoud
  • Pablo Müggler

Synopsis

N

ous sommes dans un hôtel particulier à Paris, fin août 1914, la grande guerre vient de commencer. Geneviève de Presles, femme de tête, directrice d’un hôpital militaire et décorée de la croix de guerre, s’oppose à ce que son fils Philippe, dix-huit ans, s’engage : que les autres se fassent tuer, oui, mais pas son fils. Philippe devra rester auprès de sa famille alors que son ami Sénac, lui, partira à la guerre. Six mois s’écouleront jusqu’au retour de Sénac, réformé. Mais plus rien ne sera comme avant leur séparation.

L'auteur

D

escendant d’une famille de la noblesse catalane, Henry de Montherlant fit ses études à Jeanson-de-Sailly, puis au collège de Sainte-Croix de Neuilly dont il devait s’inspirer pour écrire La Relève du matin et La Ville dont le prince est un enfant.

Mobilisé en 1916 dans le service auxiliaire, puis dans le service actif au 360e R.I., il fut blessé et décoré. Marqué par cette expérience, il en tirera Songe, roman autobiographique, et son Chant funèbre pour les morts de Verdun, exaltation de l’héroïsme de la Grande Guerre.

Nombre des œuvres qu’il publia dans les années d’après-guerre (Les Bestiaires, Les Olympiques, Aux fontaines du désir, La Petite infante de Castille, etc.) étaient empreintes du même goût pour les valeurs viriles et fraternelles, jusqu’aux Jeunes filles, roman en quatre volumes où il affichait délibérément sa misogynie et qui lui valut une renommée internationale.

Durant cette période, Henry de Montherlant choisit de séjourner la plupart du temps hors de France, autour de la Méditerranée.

Auteur fécond, il produisit une œuvre importante, dans laquelle le théâtre tint, à partir des années 1940, une place importante. Citons ses pièces les plus célèbres : La Reine morte, Fils de personne, Malatesta, Le Maître de Santiago, Port-Royal, Don Juan, Le Cardinal d’Espagne.

Henry de Montherlant écrit en 1914, à dix-huit ans, la première œuvre qu’il ait jugée digne d’être recueillie plus tard, L’Exil. Après celle-ci, il n’écrit plus de pièces de théâtre pendant vingt-six ans, jusqu’en 1940, où il compose Port Royal. L’exil est écrit précisément durant les derniers mois de l’année 1914, pendant que ses camarades étaient sur le front. L’Exil n’a qu’un sujet : une intrigue qui montre combien certains êtres s’illusionnent sur eux-mêmes, se mentent de bonne foi à eux-mêmes, sont autres que ce qu’ils croient et paraissent être. Précisément, la mère et son fils croient qu’ils agissent pour la patrie ; en réalité, ils agissent menés par des questions de personnes. Philippe n’agit que pour son ami-amant et sa mère n’agit que pour son fils.

Philippe, qui sincèrement veut et est prêt à s’engager, qui y met beaucoup d’exaltation à en parler, renoncera sans la moindre peine à s’engager du jour où son ami de collège, Sénac, qu’il comptait rejoindre dans une unité combattante, sera réformé pour blessure et reviendra civile. La langue de l’Exil est directe, précise, concise, dénuée de toutes bavures et de toute « littérature » : c’est la langue qu’il faut pour une pièce très lucide. L’écriture est une école de dépouillement et de sobriété, école aussi d’exploration de l’homme.

Il est également l’auteur d’essais. Ceux que lui inspirèrent la défaite de 40 et les années de l’Occupation : L’Équinoxe de septembre, Le Solstice de juin, Textes sous une occupation —1940-1944, Carnets — 1940-1944, furent assez discutés. On lui reprocha un certain écart entre les attitudes héroïques dont il s’était fait spécialité dans ses ouvrages antérieurs et son comportement moins engagé et moins glorieux durant ces années d’épreuves.

Sur la fin de sa carrière, Montherlant revint à la veine romanesque avec Le Chaos et la Nuit, Les Garçons, Un assassin est mon maître.

Écrivain sans cesse en quête de perfection esthétique, d’un style brillant et aéré, Henry de Montherlant est le créateur d’une œuvre où se font écho en s’opposant la morale chrétienne et la morale profane, le culte de l’héroïsme et celui de l’hédonisme.

Envisageant l’entrée de Montherlant sous la Coupole, François Mauriac écrivait dans son Bloc-notes, le 7 mars 1960 : « Montherlant, c’est pour moi un écrivain, le type même de l’écrivain français d’une certaine famille (Chateaubriand, Barrès), à laquelle je me flatte d’appartenir aussi, avec d’anciennes et solides alliances du côté de Port-Royal : j’y suis moi-même demeuré fidèle, alors que Montherlant, qui a toujours joué les libertins, y a cherché des sujets de pièce, mais non des principes de vie. Il n’empêche qu’on est des frères. »

Il fut élu à l’Académie française le 24 mars 1960, sans concurrent au fauteuil d’André Siegfried. Il n’avait pas effectué de visites de candidature, formalité à laquelle il se refusait. Agoraphobe, ou prétendant l’être, il ne fut reçu, par le duc de Lévis Mirepoix le 20 juin 1963, qu’en séance de commission de lecture. Dans son discours, assez singulier, il insista longuement sur une géographie de la Nouvelle-Zélande, pourtant fort accessoire dans l’œuvre d’André Siegfried.

Atteint de cécité et voyant ses facultés décliner, Henry de Montherlant choisit de se donner la mort à l’âge de soixante-seize ans. Ce qui avait souvent paru attitude théâtrale, chez ce grand admirateur des exemples antiques, reçut ainsi une tragique justification. Né à Paris, le 20 avril 1895, mort le 21 septembre 1972.

Note

D

Le sujet de l’Exil n’est nullement un épisode de l’auteur, qu’il aurait romancé. Il est sorti tout entier de quelques paroles échangées entre ce dernier et sa mère. L’auteur avait fait part à sa mère de son désir de s’engager pour suivre un ami. Elle lui avait répondu : « Attends pour t’engager que je sois morte. Tu n’auras pas longtemps à attendre ». Tout s’est écrit à partir de ce germe infime.

Un fils et une mère s’affrontent, s’accusent, se meurtrissent. Trop tard, quand tout le mal est fait, Philippe s’aperçoit que les mêmes mobiles, les mêmes réactions mènent sa mère et lui. Ils sont pareils et ils ne s’en aperçoivent pas.

Le personnage principal, Philippe, est un jeune plutôt snob de mise et d’esprit, pleins d’outrances, de paradoxes et d’un cynisme de gamin ; cela a été voulu par l’auteur puisque « l’exil », pour Philippe d’être condamné par sa mère à rester à l’arrière, au lieu de devenir un vrai homme en allant au front ; il croît que c’est le front qui le débarrassera de son genre insupportable, qui le tirera de « l’exil ».

L’Exil n’est pas une pièce à thèse : il y a bel et bien des gens qui vivent et meurent pour des abstractions. L’Exil étudie seulement deux caractères pour qui « tout vient des êtres ».

Captation du spectacle